Quelle que soit la façon dont les nouvelles technologies et les nouveaux acteurs contribuent à la transformation du paysage de la mobilité, les sociétés de transport doivent toujours veiller sur deux facteurs pour que le transport public reste au premier plan de l'offre de mobilité : la qualité du service, qui rend les passagers loyaux et en attire de nouveaux, et l'efficacité, qui assure une utilisation adéquate des ressources disponibles pour offrir un service de la meilleure qualité possible.

Dans les zones de transport à faible achalandage, les sociétés de transport sont confrontées à un dilemme. Si un service à itinéraire fixe ne peut être offert efficacement tout en ayant une fréquence qui respecte les attentes des passagers en matière de qualité, existe-t-il d'autres options viables? Un choix évident semble être de remplacer ou de compléter certains itinéraires fixes par des services à la demande. Mais comment les sociétés peuvent-elles être certaines que les avantages attendus se concrétiseront.

La Société de transport de Laval (STL) et le concepteur de logiciels GIRO travaillent en partenariat sur une étude qui simule le remplacement de portions d'itinéraires fixes dans des zones à faible achalandage par des solutions à la demande, afin de répondre à cette question. Plusieurs scénarios sont explorés afin d'analyser leur faisabilité économique et leurs conséquences sur les passagers.

GIRO est le concepteur derrière la solution logicielle HASTUS-OnDemand pour la planification, la confection d'horaires et l'exploitation des services de transport publics à la demande. La STL est le fournisseur de transport public à Laval, la troisième ville la plus populeuse du Québec, adjacente à Montréal et comptant une population de 420 000 personnes.

La STL opère plus de 220 bus sur 44 lignes. Sa fréquentation est de 70 000 voyages par jour et 22 millions de voyages par année. La société est reconnue pour ses initiatives en matière d’innovation en transport public : elle était l'une des premières au Canada à implanter un Système d'aide à l'exploitation et d'information voyageur (SAEIV) et la première à appliquer des modèles origine-destination aux patrons de déplacements de ses passagers.

La STL et GIRO ont entamé leur collaboration à la fin de 2017. En utilisant le Mobility Lab HASTUS de GIRO, ils tentent de déterminer si le remplacement de certaines portions d'itinéraires fixes dans des zones à faible achalandage par du service à la demande augmenterait la qualité du service, et ce, à un coût égal ou inférieur. La STL souhaitait examiner cette solution dans le but d'augmenter l’achalandage global en concentrant l'utilisation des bus sur des corridors à haute fréquence et en utilisant du service à la demande pour rabattre les clients vers les arrêts de bus. Trois lignes comprenant les caractéristiques suivantes ont été choisies comme source de données pour cette étude : 300 déplacements journaliers sont effectués en semaine sur ces trois lignes combinées ; 50 % des voyages commencent ou se terminent à deux stations de métro; l’espacement entre les voyages est trop long pour être intéressant; et la fréquentation est faible à l'extrémité de la ligne.

Lignes de la STL sélectionnées pour la phase 1 de l'étude – ligne 22 (verte), ligne 52 (orange) et ligne 74 (bleue)

Lignes de la STL sélectionnées pour la phase 1 de l'étude – ligne 22 (verte), ligne 52 (orange) et ligne 74 (bleue)

La phase 1 de l'étude simulait les conséquences du remplacement des portions aux extrémités des lignes par du service à la demande, offert par des taxis ou des véhicules sous contrat qui sont déjà utilisés pour le transport adapté. Le résultat initial de la simulation a démontré que le changement d'une partie des lignes pour du service à la demande ne constituait pas une « victoire facile ». Un des défis pratiques a été de déterminer l'endroit exact où l'itinéraire fixe réduit devrait s’arrêter. Il a également été noté que l'augmentation de la qualité du service par l'introduction du service à la demande était difficile vu la faible fréquence des services aux points de correspondance. Dans ces circonstances, les améliorations de la qualité du service n'étaient pas considérables. La phase 1 a toutefois montré que le remplacement d'une portion du service d'un itinéraire fixe par des services à la demande pouvait entraîner une réduction du coût suffisamment intéressante pour justifier l'approfondissement de l'étude.

Représentation des origines et des destinations des jours de semaine – environ 50 % des voyages commencent ou se terminent à deux stations de métro

Représentation des origines et des destinations des jours de semaine – environ 50 % des voyages commencent ou se terminent à deux stations de métro

La phase 1 de l'étude a donc permis de conclure qu'une phase 2 était nécessaire. Cette phase est actuellement en cours. Les données sources utilisées sont les mêmes que pour la phase 1, et les résultats sont attendus en juin 2018. Un des objectifs de la phase 2 est de revoir les points de correspondance entre les services à itinéraire fixe et à la demande afin d'augmenter la fréquence du service, ainsi que d'évaluer les conséquences de ces modifications sur le coût du service à la demande et sur la qualité du service. Un autre objectif est d'évaluer la qualité du service d'après le temps de déplacement global afin de mieux refléter la perception qu'ont les clients de la qualité en prenant en considération les différents éléments de l'ensemble du voyage comme la marche, l'attente à l'arrêt, le temps passé à bord du véhicule et le nombre de correspondances. La phase 2 examinera également la différence de coût et de qualité du service entre le service à la demande en temps réel et un service nécessitant une réservation.

Si les résultats de la phase 2 confirment les avantages potentiels du service à itinéraire fixe complété par du transport à la demande, la prochaine étape serait de mener un projet pilote pour la phase 3 afin de valider que les avantages peuvent être atteints en contexte opérationnel. L'infrastructure du Mobility Lab HASTUS serait utilisée pour la durée du projet pilote.

Plusieurs éléments devront être pris en considération lors de la conception du projet pilote. Le service offert sera-t-il seulement de type inter-arrêts ou y aura-t-il également un élément de type porte-à-porte? Qui sera admissible pour le service, quand et à quel tarif? Le service à la demande sera-t-il offert en temps réel ou avec une réservation à l'avance? Les correspondances seront-elles garanties, et si oui, dans quelle mesure, c.-à-d. pendant combien de temps les véhicules de correspondance attendront-ils les véhicules à la demande ou d'un itinéraire fixe qui sont retardés? Enfin, quelle devrait être la durée du projet pilote?

Ces questions seront abordées lors de la réception des résultats de la phase 2. À cette étape de l'étude, il est clair que, avant d'engager des ressources dans un nouveau modèle de service en ajoutant le service de transport à la demande à l'offre de service à itinéraire fixe, une simulation est cruciale pour s’assurer d’obtenir les avantages attendus. Jusqu'à maintenant, l'étude a démontré que le fait de compléter des itinéraires fixes dans des zones à faible achalandage avec de nouveaux services à la demande peut s'avérer un succès, tant que la demande sous-jacente est suffisante et que la qualité du service est maintenue en référence à la perception des passagers du temps de déplacement global.

Ceci pourrait vous intéresser :